Le chemin venant à la ferme était vallonné et sinueux, bien moins pratique que ce que Kanako avait imaginé. Elle s’était rarement rendue dans cet endroit de l’île – en réalité, seulement le jour de son arrivée, où on lui avait tout fait visiter rapidement -, et elle ne pensait pas que le chemin était si difficile à pieds.

Soupirant, elle repositionna son fils contre elle, maudissant sa flemmardise, qui l’avait poussée à ne pas prendre la poussette, qu’elle avait du mal à plier et déplier – encore un objet inventé par des hommes sans enfants, elle en était persuadée.

Resserrant sa prise autour du corps du bébé, elle s’efforça de ne pas trébucher sur l’une des pierres envahissant le chemin, tout en observant autour d’elle les prés où s’épanouissaient certains animaux, certains lui paraissant inhabituels. Elle se trouvait présentement devant l’enclos des lamas, et elle n’était absolument pas rassurée. Les seuls animaux qu’elle n’ait jamais côtoyés étaient des chats, beaucoup moins volumineux et plus prévisibles.

Elle resserra ses mains autour du bébé lorsque l’animal se rapprocha de leur coin, avant de continuer son chemin tout en surveillant le lama du coin de l’œil. Elle passa rapidement devant l’enclos des chèvres, dont l’odeur forte lui fit froncer le nez, avant d’arriver devant le clapier des lapins.

La plupart des lapins étaient endormis, laissant échapper un léger ronflement. L’un d’eux, à hauteur de ses yeux, était pourtant éveillé, la fixant. Elle approcha lentement le doigt, observant le petit animal. Elle caressa doucement sa tête, faisant attention aux dents – se faire mordre par un lapin n’était pas dans ses objectifs, et ne le serait jamais. Elle sourit en sentant le doux pelage sous ses doigts, plus agréable qu’elle ne l’imaginait.

Un petit pleur la tira de ses pensées, la forçant à se reconcentrer sur son fils. Ses promenades à la ferme n’étaient qu’un exercice thérapeutique donné par sa psychothérapeute dans le seul but de l’aider à se rapprocher du bébé. Cet enfant qui était, dans son esprit, le résultat de ses erreurs d’adolescence. La preuve qu’un jour, elle n’avait pensé qu’à passer ses nuits avec des hommes, jamais les mêmes, sans se protéger, sans réfléchir aux conséquences de ses actes.

Elle tenta de calmer son garçon en tapotant doucement le dos tendu sous le pyjama bleu, rêvant que la poussette vienne par magie se positionner devant eux.